Résumé
La nuit, notre corps entre dans un état particulier : en sommeil profond ou paradoxal, le tonus de presque tous les muscles s’effondre. C’est normal, c’est même une caractéristique du sommeil. Mais il existe une exception : les muscles du pharynx. Véritables “vigiles”, ils assurent la sécurité des voies aériennes et maintiennent le passage de l’air ouvert. Quand ce système de sécurité est défaillant, peuvent survenir des apnées du sommeil.
1) C’est quoi une apnée ?
La nuit, l’air circule dans un “tunnel mou” derrière le nez et la bouche : le pharynx.
- Ronflement : le tunnel est rétréci, l’air qui passe fait vibrer les parois.
- Apnée : le tunnel se colle pendant quelques secondes ; l’air ne passe plus. Le cerveau déclenche alors un micro-réveil qui rouvre le passage.
2) Où cela se passe-t-il et pourquoi là ?
Le nez et le larynx sont faits d’éléments rigides (os ou cartilage) qui restent ouverts en toutes circonstances.
Entre les deux se trouve le pharynx, un conduit formé de tissus mous et de muscles, beaucoup plus fragile.
Les trois étages du pharynx :
- Nasopharynx : derrière le nez, au-dessus du voile du palais. C’est une zone qui reste globalement stable, sauf en cas d’encombrement nasal.
- Oropharynx : derrière la bouche, au niveau du voile du palais et de la base de langue. C’est la zone la plus vulnérable : le voile peut vibrer (ronflement) ou se coller, et la base de langue peut reculer en bouchant le passage.
- Hypopharynx : juste au-dessus du larynx. Cette zone est aussi à risque de fermeture, surtout si la langue est volumineuse ou si la mâchoire inférieure est en retrait.
👉 Ainsi, les apnées du sommeil surviennent principalement à l’oropharynx et à l’hypopharynx, alors que le nasopharynx joue surtout un rôle de couloir d’amont.
3) Ce qui maintient le tunnel ouvert quand on est éveillé
Deux muscles “gardiens” empêchent le pharynx de se coller :
- le génioglosse (il tire la langue vers l’avant, agit surtout à l’oro-/hypopharynx),
- le tenseur du voile (il stabilise le voile du palais, agit au naso- et à l’oropharynx).
Ils reçoivent des ordres automatiques et des réflexes : si l’inspiration “aspire” plus fort, ils augmentent leur contraction pour garder le tunnel ouvert.
4) Ce qui change la nuit
En s’endormant, le tonus de ces muscles baisse (surtout en sommeil paradoxal).
L’inspiration crée toujours une dépression (comme lorsque l’on boit avec une paille). Si la paille est molle, elle s’affaisse : le pharynx se rétrécit, le débit d’air plafonne (“débit limité”), puis il peut se fermer : c’est l’apnée.
Ce phénomène touche surtout l’oropharynx (voile, base de langue) et parfois l’hypopharynx.
5) Du rétrécissement à la vibration : le ronflement
Quand le passage se resserre, l’air doit passer plus vite. Cette vitesse crée des turbulences qui font vibrer les parois molles, comme une voile qui claque au vent : c’est le ronflement.
Chez certaines personnes, le rétrécissement reste partiel : elles ronflent mais laissent passer assez d’air, donc pas d’apnée.
Chez d’autres, le rétrécissement devient complet par moments (souvent au voile ou derrière la langue) : c’est l’apnée.
6) Pourquoi certaines personnes ferment plus facilement ?
Plusieurs éléments rétrécissent ou fragilisent le tunnel (surtout à l’oro-/hypopharynx) :
- Petite mâchoire inférieure en arrière (rétromandibulie) : il y a moins de place pour la langue, qui recule.
- Graisse ou volume supplémentaire autour du pharynx (prise de poids) : la paroi est plus épaisse, l’espace intérieur est réduit, et le tunnel se colle plus facilement sous l’effet de l’aspiration inspiratoire.
- Langue volumineuse ou amygdales hypertrophiées : obstacle interne au niveau de l’oro-/hypopharynx.
- Nez encombré : l’air passe moins bien au nasopharynx, l’inspiration “tire” plus fort et favorise la fermeture en aval.
- Facteur héréditaire : la forme du visage, la taille de la mâchoire ou la souplesse des tissus peuvent être en partie héritées, ce qui augmente la prédisposition sans en faire une fatalité.
7) Comment l’apnée se termine
Pendant l’apnée, l’oxygène baisse et l’effort respiratoire augmente. Des capteurs préviennent le cerveau, qui déclenche un micro-réveil : les muscles “gardiens” se retendent, l’oro-/hypopharynx se rouvre, l’air re-passe, puis le sommeil reprend.
Mais répété de nombreuses fois, cela fragmente le sommeil : celui-ci devient moins profond, moins réparateur, et c’est ce qui explique la fatigue, la somnolence ou le manque d’énergie dans la journée.